Jean-Jacques Adam sur les sièges velours rouge du théâtre Monsabré à Blois.

Fermeture de Monsabré : le théâtre blésois au bord du gouffre

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La façade du 11 rue Bertheau à Blois rappelle les cabarets populaires du vieux Montmartre. L’enseigne noir et rouge floquée Théâtre Monsabré surplombe un festival d’affiches posé sur le portail en fer forgé vert-émeraude. L’artiste à l’origine de cette composition est engoncé dans un sweat à capuche, un jogging Puma et des solaires miroir. Son look est aussi flamboyant que son moral est maussade. Jean-Jacques Adam risque de mettre la clé sous la porte et sa silhouette dégingandée de disparaître du quartier Blois-Vienne.

Par Alberto Rodriguez Pérez
Publié le 29 mars 2021

Cest l’histoire d’un petit théâtre qui ne veut pas mourir. C’est même l’histoire d’un petit théâtre qui gagne chaque année des spectateurs et finit par devenir un pôle culturel populaire. « Monsabré » est une petite salle de 240 places nichée dans la cour d’une école privée d’enseignement catholique dans le quartier Blois-Vienne. Depuis sept ans, Jean-Jacques Adam, président de l’association Théâtre Monsabré, y organise deux à trois spectacles par semaine, concerts, pièces de boulevard et one-man-shows. Mais ça, c’était avant le confinement…

Bataille rangée

Car voilà qu’en pleine crise sanitaire, la fondation Victor Dillard, propriétaire du théâtre et dont l’objet est de mettre des locaux à disposition de l’enseignement catholique, annonce qu’elle résiliera le bail au 31 décembre 2020. Le 26 juin, six mois avant l’échenace, elle prévient Jean-Jacques Adam par lettre recommandée et légitime la résiliation par « les besoins de l’enseignement catholique de Loir-et-Cher ».
Elle fait savoir que « les contraintes sanitaires actuelles l’amènent à rechercher des locaux pour le maintien d’activités scolaires et parascolaires dans le respect des règles de distanciation. » Selon le directeur diocésain de l’enseignement catholique, « la Fondation Victor Dillard souhaite mettre à disposition le théâtre pour des activités telles que l’entraînement au grand oral des Terminales, des classes de théâtre pour les cinq écoles, les quatre collèges et les deux lycées catholiques du Blaisois. »


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Dès réception de la lettre, Jean-Jacques Adam se rapproche de maître Denys Robiliard. L’avocat blésois dénonce la nature du bail et la justification de la reprise. D’une part, dit-il, « c’est une association qui utilise le bail pour produire des spectacles. Il s’agit donc d’un bail professionnel 3, 6, 9 et il est renouvelé de facto jusqu’au 28 février 2023. »
« Par ailleurs, si le bail n’est pas jugé comme professionnel, alors le bailleur peut en effet reprendre les locaux en cas de besoin et résilier chaque année. Or, la Fondation justifie la nécessité de reprendre les locaux à des fins scolaires. Mais, il s’agit d’un théâtre et non d’un amphithéâtre. Il n’a pas vocation à accueillir des classes. Pour nous,
conclut-t-il, la motivation de la résiliation n’est pas justifiée. »

Happy end impossible

En attendant, Jean-Jacques Adam reste dans « son » théâtre. Le bouillonnant directeur a certes quelques atouts dans la manche mais aussi des crédits et des prêts d’honneur à rembourser. Il a lancé un appel à cotisations pour sauver l’association, alors que les deux confinements ont mis en péril sa trésorerie. « Nous avons déjà reçu 150 adhésions. Cet appel est aussi une façon de montrer que le public nous soutient et que nous sommes déterminés à rester ouverts », témoigne le directeur. Il a par ailleurs mis en ligne la pétition « Non à la fermeture du théâtre Monsabré » sur le site change.org. En un rien de temps, 19 000 signatures (la ville de Blois compte 45 000 habitants) ont été engrangées. Autant de soutiens qui attendent la réouverture du lieu.

Car Jean- Jacques Adam programme toujours des spectacles pour l’après Covid. Au grand dam de son bailleur qui parle d’occupation illégale. Pour éviter que des réservations ne soient annulées, la Fondation a proposé des locations ponctuelles afin d’honorées ces dates. Une perspective catégoriquement refusé d’abord par le directeur avant d’envisager enfin une utilisation partagée.

Fin février, à la veille de la tentative de conciliation devant la justice, une réunion de médiation a été organisée sous l’égide du maire de Blois pour essayer de rapprocher les positions. A la sortie de l’Hôtel de ville les divergences semblaient abyssales et il paraît bien difficile de trouver une fin heureuse à cette « mauvaise pièce ». A ce jour, le théâtre Monsabré et son directeur, ne peuvent être sauvés, que par un sursaut de charité chrétienne.


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