Femme senior bénévole aux Secours catholiques…

Laissons aux seniors le choix de leur retraite…

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Le paysage est presque figé. Une grande partie des Français reste opposée à la réforme des retraites. Les syndicats marchent main dans la main et multiplient les appels à manifester. À l’Assemblée nationale, le début d’examen du projet du gouvernement s’est déroulé dans une atmosphère chaotique. Dans ce climat houleux, est-il judicieux de reporter l’âge légal de départ à la retraite alors que seul un tiers des Français approchant les 64 ans travaille encore ?

Par Alberto Rodriguez Pérez
Publié le 9 février 2023

En mettant l’accent sur le recul de l’âge de départ, la réforme laisse dans l’ombre les réalités du marché du travail des seniors. Il est vrai qu’avec un taux d’emploi des seniors à 56 % en dessous de la moyenne européenne (60 %), la France dispose de marges de progression.

Mais bosser davantage ne sera véritablement possible que si nous donnons une valeur nouvelle au travail devenu de moins en moins central dans nos vies. Imaginons donc de nouvelles formes de travail des seniors plus adaptées à leur maturité. L’enjeu pourtant essentiel s’énonce simplement : comment veut-on vivre « l’avant-vieillesse », cette période intercalée entre l’âge mûr et la vieillesse ? En effet, nous ne vivons pas vieux plus longtemps, nous devenons vieux plus tard. Et cela change tout ! Ce moment de vie qui va de 55 ans à 75 ans n’est aujourd’hui pensé que selon le paradigme ancien, retraite ou activité professionnelle.

Cette période où l’on est mûr sans être vieux pourrait cependant être vécue de manière différente, un maintien de l’emploi qui passe graduellement à l’engagement social. On peut ainsi travailler plus longtemps sans pour autant poursuivre le métier que l’on ne veut ou que l’on ne peut plus exercer. Pour y parvenir, au-delà de la loi, ce mouvement doit se faire au cas par cas. Cela passe par des négociations entre les entreprises et leurs salariés. Et il faudra bâtir des solutions locales avec les associations et les collectivités pour réinvestir le temps de travail des salariés seniors quittant progressivement l’emploi salarié. Le tout ouvrant des perspectives aux salariés en fin de carrière qui ne voient pas d’alternative entre le travail et la retraite et pour lesquels l’engagement associatif reste inenvisageable. Les activités d’utilité sociale sont protéiformes et chacun peut s’y épanouir et retrouver également une relative prospérité financière.

Pour une meilleure contribution au financement des retraites, les seniors doivent produire des richesses de façon différente. Si 75,1 % des 55-59 ans travaillent, seuls 35,5 % des 60-64 ans ont toujours une activité professionnelle. L’approche actuelle nuit à la fois aux perspectives de mieux vivre qu’offre une fin de carrière plus conforme aux aspirations de chacun et à l’impact économique de la relocation de ces « ressources humaines ». En les réorientant vers des activités sociales, nous sortirons du fatalisme de rester le plus longtemps possible en entreprise et d’une retraite si longuement attendue qu’elle se traduit par un retrait de toute vie sociale.

Agissons pour encourager la société dans ce nouveau rapport au travail pensé tout au long de la vie et différencié selon les âges. Retraite progressive, cumul emploi retraite, semaine de quatre jours… Outre l’index senior prévu dans le cadre de la réforme pour mieux connaître la place des salariés en fin de carrière, construisons un nouveau contrat de génération. Mettons en place les conditions propices au maintien des seniors dans des occupations utiles à la société au travers de dispositifs personnalisés. Dépassons les clivages, corrigeons le tir et soyons plus imaginatifs !


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