Gros plan de viel homme tenue par un médecin.

Fin de vie : prenons le temps d’y travailler

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Que retenir de la convention citoyenne sur la fin de vie qui a rendu ses conclusions début avril ? Les cent quatre-vingt-six membres se sont prononcés (à 76 %) pour une ouverture à la légalisation du suicide assisté et de l’euthanasie. Et cela pour les patients atteints de douleurs réfractaires qui demanderaient une aide active à mourir. Ils ont néanmoins nuancé les modalités d’application. Dans leur avis, ils balisent le chemin jusqu’au suicide assisté et dessinent ensuite deux sentiers parallèles sur l’euthanasie, celui qui mène à une exception et celui qui conduit à en faire une solution alternative.

Par Alberto Rodriguez Pérez
Publié le 6 avril 2023

Faut-il légaliser le suicide assisté (lorsque le patient s’administre lui-même le produit létal) voire l’euthanasie (quand un soignant l’injecte) ? S’agit-il d’un progrès ou d’une dangereuse rupture anthropologique ? Choisir sa mort est-ce un droit, une liberté individuelle ? Donner la mort peut-il relever du soin ?

Charge désormais au gouvernement, aux députés et aux sénateurs, de mener de manière transpartisane une œuvre de coconstruction, sur la base de cette référence solide qui est celle de la convention citoyenne. À en croire Emmanuel Macron, un projet de loi sera bâti d’ici à la fin de l’été. Le président souhaite un « modèle français de la fin de vie ». Celui-ci doit tenir, respecter les bornes posées par les membres de la convention et trouver une voie de passage sans fracturer à nouveau le pays.

On meurt seul, mais on a le droit d’être accompagné…

Cet étrange exercice de démocratie, pratiqué par des citoyens tirés au sort, a le mérite de mettre en lumière le manque de moyens pour les soins palliatifs. Pour éviter aux Français les épreuves de la fin de la vie, les travaux de la convention alertent en premier lieu sur la nécessité de développer l’accès aux traitements destinés à apaiser les douleurs et les souffrances. Déjouant les intentions cousues de fil blanc des initiateurs, la convention a souhaité élargir la question qui lui était posée. Ainsi, elle met en avant les conditions préalables à toute ouverture de l’aide active à mourir : égalité d’accès aux soins, meilleure culture palliative, rôle des médecins, processus collectif de décision, etc.

Les deux tiers des patients qui devraient bénéficier d’une prise en charge en soins palliatifs n’y ont pas accès, faute de moyens. Les budgets sont insuffisants. L’État est défaillant, malgré vingt ans de programmes successifs de développement. Un sursaut salutaire est nécessaire pour ne pas alourdir davantage l’épreuve de la mort. Dans une prise de conscience citoyenne, la commission insiste sur l’impératif de consacrer des ressources pour une solidarité palliative active. Au lendemain de la remise du rapport, le chef de l’État a lancé « un plan décennal national pour la prise en charge de la douleur et pour les soins palliatifs, avec les investissements qui s’imposent ». Bien que la problématique reste le manque d’équipes dédiées, le projet pourrait aller jusqu’à fixer un seuil de lits réservés aux soins palliatifs dans chaque territoire. Il devrait permettre plus largement les soins palliatifs à domicile et développer la formation des professionnels de santé.

Le président de la République a estimé que l’État avait « une obligation de résultat » pour assurer « l’accès réel aux soins d’accompagnement à la fin de vie ». Accusé de ne pas entendre les Français opposés à la réforme des retraites, Emmanuel Macron veut montrer qu’il sait être à l’écoute. Qu’il soit en quête d’un nouveau consensus politique, soit. Mais la fin de vie, dont il a voulu faire un grand débat national, est un sujet, un enjeu de société majeur ne pouvant pas faire l’objet d’un calcul politique quelconque.


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