Poutine, jusqu’au-boutisme et au-délà…

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Moscou maquille ses défaites avec de faux référendums d’annexion et la menace nucléaire. La seule victoire de Vladimir Poutine est la propagande. Ses succès, terribles et sanglants, se résument à se venger des déroutes militaires en bombardant des civils, comme cela s’est produit à Zaporijia. Ou rhétoriques, telle la sombre célébration de l’annexion unilatérale de territoires ukrainiens conquis par la force en même temps que ses troupes reculaient et fuyaient devant l’avancée de leur ennemi dans la ville de Lyman.

Par Alberto Rodriguez Pérez
Publié le 6 octobre 2022

Le président russe reste maître de la menace et de l’intimidation. En revanche, il fait preuve de piètres compétences en tant que commandant en chef des armées de plus en plus discréditées. Ses paris politiques et diplomatiques dans la gestion internationale du conflit se sont tous avérés erronés. En Russie, le mécontentement grandit et la mobilisation partielle décrétée dans la difficulté a déclenché de nombreuses manifestations. Elle s’est traduite jusqu’à présent par moins de conscrits enrôlés que de jeunes Russes fuyant à l’étranger. De plus en plus considérées avec suspicion, ses menaces nucléaires nuisent au soutien de sa cause, même par les pays les plus favorables à ses objectifs anti-occidentaux.

Plus inquiétants sont les sabotages présumés des gazoducs Nordstream 1 et 2, reliant la Russie à l’Allemagne, avec lesquels Poutine entend démontrer non seulement la fragilité de l’approvisionnement énergétique de l’Europe, mais aussi les capacités de la Russie dans la guerre hybride. Des opérations délibérées cherchant à favoriser le complotisme et obtenir qu’une partie de l’opinion publique adhère à l’idée que le responsable peut être l’un des États qui en subit les effets. Ils sont considérés par les Européens comme l’étape précédente de l’attaque nucléaire tactique redoutée, que les amis les plus truculents de Poutine lui recommandent déjà. Et personne parmi les alliés de Kiev, n’exclut la supputation à ce stade.

Le bilan catastrophique de la guerre n’incite pas à l’optimisme quant à une fin prochaine des combats. Le robinet de gaz d’une main et la menace nucléaire de l’autre, Poutine entend semer la zizanie cet hiver entre les alliés européens et les États-Unis. Après avoir déclaré formellement et irréversiblement annexer les quatre provinces de l’est de l’Ukraine, il tentera de briser le front uni autour de Volodymyr Zelensky pour favoriser leur cession définitive en échange de la paix. Le président ukrainien a déjà donné la réponse implicite en présentant la candidature de son pays à l’Alliance atlantique, exactement l’opposé à la raison formelle pour laquelle Poutine est entré en guerre.

Vladimir Poutine poursuit sa fuite en avant. Persuadé de sa mission dans l’histoire russe de rétablir la grandeur du pays, le président russe n’est pas guidé par le calcul rationnel et froid des coûts et des bénéfices, mais par une haine viscérale de l’Ukraine et de l’Occident. En quelques mois, il a fermé les portes au dialogue et à la diplomatie et persiste dans la voie d’une guerre sans règles, qui n’obéit à aucune valeur morale. Il semble peu réaliste aujourd’hui qu’il fasse marche arrière, le but de la surenchère infernale est de faire craquer l’adversaire le premier.  La position de l’Occident reste difficile : soutenir l’Ukraine sans devenir cobelligérant, rendre crédible la dissuasion nucléaire tout en indiquant à la Russie qu’il ne cherche pas sa destruction. Dans les conditions d’escalade imposées par Poutine, cette équation sera de plus en plus difficile à tenir.


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